Lors d’une récente conférence, le professeur de psychologie environnementale David Uzzell (Université de Surrey, GB) a donné quelques pistes pour décrypter nos attitudes à l’égard du climat. Et le temps presse : l’Organisation météorologique mondiale a confirmé le 2 février que l’année 2014 a été la plus chaude jamais enregistrée sur la Terre. L’an dernier, la température moyenne à la surface du globe a dépassé de 0,57°C la moyenne calculée pour la période de référence 1961-1990.

Climat : Le XXIe siècle compte déjà 14 des 15 années les plus chaudes de l’histoire.

Alors que faire ? Ou plutôt : pourquoi ne fait-on pas davantage pour le climat ? D'abord, le professeur Uzzell a rappelé à quel point les effets des perturbations du climat nous paraissent théoriques. La fonte de la banquise, l’augmentation du niveau des océans, la multiplication des phénomènes météorologiques extrêmes nous semblent lointains et différés dans le temps. Cette distance spatio-temporelle ne nous incite pas à nous impliquer et justifie notre inaction.

Par ailleurs, les chercheurs pointent le fait que les populations interrogées ne s’attribuent aucune cause directe dans les dérégulations climatiques ; elles désignent l’inaction gouvernementale, l’activité industrielle ou la situation des pays en développement. Or, si toutes ces causes sont exactes, notre responsabilité de consommateur de pays industriels est également directement impliquée dans les émissions de gaz à effet de serre, notamment via notre alimentation (agriculture industrielle abreuvée de produits phytosanitaires toxiques, engrais chimiques de synthèse, transports et importations de biens en zig zag sur la planète rejetant de grandes quantités de gaz carbonique, etc) ou nos choix de mobilité.

Il y a donc là bien un problème d’information des populations. “Les gens ne sont pas intéressés par des concepts comme « sauver la planète » ou « agir pour leurs petits-enfants ». Ils veulent connaître les effets concrets et immédiats sur leur quotidien et savoir en quoi agir en faveur de l’environnement - ce qu’ils considèrent comme un sacrifice - peut leur servir”, a expliqué David Uzzell au Guardian. C’est le principe des compteurs Linky par exemple, qui informent les habitants en temps réel sur leur consommation d’électricité, et les économies résultant de leurs choix (réduire la température des pièces d’un degré, etc).

Enfin, parmi par les moteurs qui nous inciteraient à nous impliquer davantage, il y en a deux derniers. Le premier est souhaitable, c’est de focaliser sur les effets positifs de la lutte contre les changements climatiques, comme la création d’emplois verts : “Nous ne devrions pas parler de la façon dont nos existences vont se détériorer en raison du changement climatique mais de quelle façon il pourrait nous aider à vivre plus heureux, en meilleure santé et dans un meilleur environnement”, poursuit David Uzzell.

Le second est moins heureux, c’est la peur. Des études ont démontré qu’une forte peur peut convaincre la population de la gravité de la situation. Ce fut le cas durant les épisodes climatiques extrêmes récents aux Etats-Unis (tempêtes, cyclones) ou le typhon Haiyan aux Philippines par exemple (il a causé près de 10 000 morts). “Plus de canicules, des périodes de sécheresse prolongées, plus d’incendies de forêts, plus de restrictions alimentaires et de plus nombreuses disparitions d’espèces seraient impossibles à ignorer. Alors, l’inaction se corrigerait d’elle-même, car la menace deviendrait si grande qu’un comportement dilatoire aboutirait à une issue fatale”, ont assuré un groupe de réflexion (Taskforce) dans une étude présentée à l’Association américaine de psychologie en août 2014.